La plupart des Canadiens y sont favorables, alors que des phénomènes météorologiques extrêmes les ont sensibilisés aux effets potentiellement néfastes découlant des changements climatiques. Les marchés financiers manifestent de plus en plus leur intention d’affecter des fonds aux secteurs et aux activités qui présentent des niveaux d’émissions plus faibles. Les organismes de réglementation des systèmes financiers commencent à exiger que les banques et les assureurs communiquent leur exposition directe et indirecte aux risques climatiques, ce qui pourrait modifier le financement au pays. Les facteurs liés à l’environnement, à la responsabilité sociale et à la gouvernance (ESG) font de plus en plus partie intégrante des décisions de consommation, d’affaires et politiques. Tout cela encourage vivement les entreprises canadiennes – particulièrement dans les secteurs dont les émissions sont élevées, comme celui du pétrole et du gaz – à planifier la façon dont elles freineront la production de carbone et contribueront à la réalisation des objectifs fixés par le gouvernement.
Ne vous méprenez pas : l’atteinte des cibles d’émissions nécessitera une importante transformation de notre économie. L’éventuelle incapacité du système financier canadien à assumer le coût de la transition vers un avenir à faible intensité de carbone est une préoccupation courante. Or, le fruit de notre travail démontre que, grâce à la bonne combinaison de politiques et d’investissements, notre économie continuera de croître à un rythme à peine inférieur. Pour assurer la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, il faudra maximiser l’utilisation des technologies et les investissements. Le report des mesures n’aura probablement pour effet que d’augmenter les coûts de transition et d’atténuer les gains qui pourraient conférer au Canada une position de chef de file de ce virage écologique. Une solide orientation, l’appui du public, des mesures audacieuses, des investissements considérables et une importante collaboration entre les secteurs public et privé seront nécessaires pour nous permettre de tirer le maximum de l’occasion qui s’offre à nous.
Grâce à la bonne combinaison de politiques et d’investissements, notre économie continuera de croître à un rythme à peine inférieur
Le plan de tarification du carbone du gouvernement fédéral sera essentiel à l’adoption de changements efficients sur le plan économique. Une partie de ces revenus devrait revenir aux consommateurs, ce qui assurera l’appui du public; mais une part plus importante devra probablement être attribuée aux entreprises et aux investissements verts pour accélérer l’adoption de technologies propres. Si les revenus générés par la tarification du carbone sont réinjectés dans l’économie – et plus particulièrement canalisés vers les investissements – les coûts associés à la transition vers un avenir sobre en carbone peuvent être réduits au minimum. En effet, une modélisation effectuée par l’équipe d’économistes de Deloitte à l’aide de son modèle d’équilibre général démontre que d’ici 2030, la croissance économique canadienne ne reculera que d’environ 0,1 point de pourcentage par année.
Le Canada doit suivre un régime faible en carbone
L’un des principaux problèmes, c’est que l’actuel débat public au sujet des changements climatiques est axé sur la transition vers un avenir à faible intensité de carbone plutôt que sur la réalité future et ses retombées. Voici une analogie intéressante : personne n’aime suivre un régime, car on ne peut pas manger ce qu’on veut, on manque de volonté, etc. Pour cette raison, la perception des régimes est négative, mais le résultat final peut être un corps plus sain et résilient. Ainsi, le Canada doit suivre un régime faible en carbone.
Dans un avenir carboneutre, l’économie du pays s’annonce prospère. Depuis un demi-siècle, un virage important de la fabrication et l’extraction vers les services s’est amorcé; au cours du prochain demi-siècle, la composition sectorielle de l’économie continuera d’évoluer, alors que les secteurs à faibles émissions de carbone seront florissants. Le but de cette étude était de regarder au-delà de 2030 pour déterminer ce à quoi pourrait ressembler cet avenir. À cette fin, nous nous sommes fiés aux résultats de deux autres modèles pour établir d’abord les technologies qui nous aideront à atteindre la carboneutralité et, ensuite, ce à quoi ressemblera l’économie du Canada tandis que nous passons à l’étape de réduction dramatique des émissions après 2030.
Bien entendu, ce parcours sera tortueux et semé d’embûches. Malheureusement, il y aura sans doute des coûts associés au délaissement d’actifs, ce qui, dans le jargon économique, signifie qu’on remplacera du capital toujours productif par de nouveaux investissements qui génèrent moins d’émissions. Et les investissements requis pour atteindre la carboneutralité sont importants, soit entre 5 et 6 % de l’économie; aussi, nous devons commencer à réfléchir aux moyens et aux sources de financement de ces investissements. Mais il est également possible que ces nouvelles technologies et ces nouveaux investissements entraînent leurs propres innovations, qui amélioreront à leur tour la productivité.
Nous pouvons devenir un chef de file dans des domaines des technologies propres comme le captage et le stockage d’hydrogène et de carbone
Les coûts d’adaptation s’atténueront avec le temps et la transformation qui en découle créera d’importantes occasions pour le Canada : nous pouvons devenir un chef de file dans des domaines des technologies propres comme le captage et le stockage d’hydrogène et de carbone. Le secteur national du pétrole et du gaz peut être respectueux de l’environnement. Nous aurons un secteur d’énergie verte de premier plan. Le Canada sera en mesure d’exporter ses nouvelles technologies écologiques durables, ses services techniques et son savoir-faire à l’échelle mondiale. Le pays sera doté d’une infrastructure résistante aux phénomènes climatiques. Nous serons une option attrayante pour les talents et le financement internationaux. Tous ces avantages viendront appuyer la croissance économique soutenue du Canada et, du coup, l’amélioration du niveau de vie d’un océan à l’autre.
Il est maintenant temps d’unir nos forces et de déterminer comment nous réaliserons cet objectif global en tant que pays.